Indigènes
On a beaucoup parlé de ce film. Beaucoup, mais pas trop, cela est sûr.
Tant il est vrai que j'avais quelques "prévenances" comme on dit poliment envers ce film. Je voyais déjà arriver avec ses gros sabots le machin politique et bien pensant, rempli de gentils arabes, de méchants français, avec en prime Debouzze et Nacéry, que je n'apprécie vraiment pas, c'est peu dire.
Et pourtant... La bande-annonce, particulièrement bien fichue, et une (petite) dose de chauvinisme (une partie du film a été tournée dans mes Vosges natales) m'ont incité à aller le voir.
Et je ne fus pas déçu!!!
A la fin de la séance, je dus me rendre à l'évidence: - pour la première fois depuis longtemps, je vois un bon film de guerre français. Sans temps mort. Avec tous les passages du genre. Un film français par essence, avec ses particularités et le point d'histoire bien spécial sur lequel il s'attarde, mais avec tous les ingrédients et le talent d'un film de guerre américain.
- deuxième surprise: je venais en effet de voir un film politique, un film engagé pour le moins. Mais curieusement, beaucoup plus modéré que je ne l'aurais cru. Presque consensuel. Avec un propos intelligent et nuancé.
- troisième plaisir, et non des moindres: on voit très peu Samy Nacéry (et dans un rôle de soldat assez salaud), ce qui est bien; et Jamel, malgré son omniprésence, remplit parfaitement son rôle et parvient à jouer juste, sans les excès qui le caractérise habituellement, ce qui est mieux.
- ensuite, j'ai fait une découverte, celle d'un réalisateur, Rachid Bouchareb, dont la caméra sait parfaitement caresser la lumière pour faire ressortir toute la beauté et la dureté des paysages traversés par ses personnages. Qu'il s'agisse de la blancheur aveuglante et sèche du djebel, des chemins de pierre de la Provence, ou des neiges vosgiennes, tout est impeccablement filmé, sans emporter le propos, juste en le soulignant comme il faut. Un réalisateur qui sait également brosser rapidement et détacher ses personnages avec tact et subtilité, sans jamais les enfermer totalement dans leurs caractéristique. En somme, un cinéaste à suivre, qui sait, avec rigueur et sans pathos faire du cinéma de qualité, savamment dosé.
- et puis, j'ai découvert deux acteurs fabuleux: Sami Bouajila, le caporal arabe, et Bernard Blancan, le sergent pied-noir. Ces deux acteurs, avec un jeu tout en nuances, donnent un relief et une force aux deux personnages principaux, tenant presque à eux seuls tout le film.
En somme, un succès que j'encourage tout le monde à aller voir.